L’avocate de la partie civile avait vu juste dans sa boule de cristal. « Je connais trop bien ces dossiers d’accidents du travail sur des chantiers de co-activité pour les plaider depuis presque 30 ans, prédisait-elle en préambule de sa plaidoirie. On assiste toujours à la même chose : la dilution des responsabilités. Chaque avocat de la défense vous répétera, ce n’est pas ma faute, c’est l’autre qui est en tort…’‘ » Elle ne s’était pas trompée. C’est précisément la partition qu’a jouée la défense dans la chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Bonneville, jeudi 10 octobre 2024, pour demander la relaxe de ses clients respectifs, accusés d’homicide involontaire. Le 24 juin 2020, la société 100drillon.net74 intervient à Cluses, sur un chantier immobilier d’ampleur, la construction de 44 logements chiffré « à plus de 10 millions d’euros » selon l’inspection du travail, et étalé sur deux ans, pour une opération de nettoyage de fin de chantier.
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La mission est fatale à l’une de ses salariées. Présente ce jour-là aux côtés de son mari, employé lui aussi par cette entreprise, Khaddouj A. disparaît. Son balai gisant sur le sol est la dernière trace de son passage. Elle est retrouvée inanimée au fond d’un vide sanitaire contenant 80 centimètres d’eau, placé dans une descente de garage, et décède deux jours plus tard à l’hôpital. Fait intriguant : la plaque recouvrant ce trou – une trémie, dans le jargon des professionnels du bâtiment – est bien en place…
La plaque renfermant le vide sanitaire a-t-elle été fixée ? Telle est la question
Cet homicide involontaire, c’est un match de poker menteur entre la défense des co-accusés, les sociétés 100drillon.net74 et La Maçonnerie Technique, chargé du gros œuvre sur ce chantier, les parties civiles, et l’inspection du travail. Avec une question centrale : la plaque recouvrant ce vide sanitaire était-elle suffisamment sécurisée, et conforme au Code du travail ? A-t-elle vraiment été fixée avec des clous, comme l’affirme le patron de la Maçonnerie Technique, Vitor D., qui explique en audition l’avoir vu de ses yeux être scellée, avant de dire l’inverse à la barre, et d’évoquer une « plaque provisoire » ? Ou juste posée, comme le soutiennent plusieurs ouvriers et l’inspection du travail ? Une seule certitude, elle n’était pas fixée lors de cette chute mortelle.
« La sécurité n’était le sujet de personne sur ce chantier »
Quand la présidente du tribunal répète plusieurs fois que « les gendarmes l’ont trouvé intacte, sans trace de fixation », le prévenu rejette la faute sur ses salariés dépêchés sur place, qui lui auraient assuré l’inverse. Et reste campé sur sa ligne de défense : « Je ne comprends pas pourquoi on a soulevé cette plaque… pour ne rien faire », lâche l’homme en boucle, pour se dédouaner.
« La sécurité n’était le sujet de personne sur ce chantier, assène l’avocate des parties civiles, accusant la défense de « réécrire l’histoire ».
« Une personne est décédée parce qu’il y a une succession d’irresponsables. Elle s’est retrouvée dans un piège, mentionné nulle part. »
Les zones d’ombre sont nombreuses : pourquoi aucun Plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) n’a été dressé ? Les deux entreprises accusées était-elle au courant que cette descente de garage était dangereuse, et qu’un plombier y était déjà tombé, voyant lui aussi la plaque se refermer sur lui – il doit son salut à l’intervention d’un collègue présent à proximité – en décembre 2019, soit six mois avant le drame ?
Que savaient vraiment ces deux sociétés des risques inhérents à ce chantier, présentant « des risques de chutes avérées, voire graves » dixit le coordinateur de sécurité, dans un de ses écrits ? Les ouvriers de la Maçonnerie Technique, dont le chef d’entreprise assume s’en être peu préoccupé, se reposant sur ses salariés – « j’avais cinq chantiers en même temps » – ont-ils failli dans le nettoyage qui leur incombait, comme il leur est reproché ? À en croire les comptes rendus de réunions de chantier, cette faute a poussé le cabinet d’architecte LG2A – qui dirigeait ce chantier – à sous-traiter ce nettoyage, et conduit involontairement une femme à la mort. Argument repris par les parties civiles.
« La Maçonnerie a été mise devant le fait accompli »
La défense joue pleinement la carte du flou pour tenter de se dédouaner, assurant que ses clients n’étaient au courant de rien – « l’entreprise a été mise devant le fait accompli sur le manque de sécurité de ce chantier », assure l’avocat de la Maçonnerie Technique – et que « les responsabilités, s’il y en a », sont partagées.
« Il demeure une ambiguïté dans ce dossier… Peut-on condamner une société sur une ambiguïté ? Une partie de la réponse se trouve dans la question »
La défense n’a pas hésité à mettre en doute la rigueur de l’enquête pour demander la relaxe. « Pourquoi le représentant du cabinet d’architecte, présent quotidiennement, n’a pas été interrogé par l’inspection du travail ? » (Me Guyenard) ; « Pourquoi n’a-t-on pas pris de photo de près de cette plaque, ce qui aurait montré si elle avait réellement été fixée ? » (Me Doyez). Me Bezzina va même jusqu’à mettre en doute la position du mari veuf : « Si il estime que la société de nettoyage a commis une faute morale, pourquoi y est-il toujours salarié, quatre ans après ? »
Estimant que « la société la Maçonnerie Technique n’a jamais pris les responsabilités de son rôle », et que si « si la société de nettoyage avait correctement formé et informé ses salariés, l’accident n’aurait peut-être pu être évité, mais on aurait pu au moins prévenir les risques », la procureure a requis six mois de prison avec sursis contre le chef d’entreprise de la Maçonnerie Technique, Victor D., assorti de lourdes amendes, et plus de 50 000 € d’amendes pour la responsable de la société de nettoyage 100drillon.net74, Fatima L.. Le délibéré est attendu pour le 12 décembre, à 9 h.
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