La loi du 22 avril 2024 crée un cadre juridique propre au report des droits à congés suite à un arrêt maladie.
Une imprécision figure dans de nombreux articles sortis à la suite de la publication de la loi. Elle tient du manque d’analyse de la notion même de report des congés. La loi fixe désormais un cadre permettant le report des droits à congés n’ayant pu être pris à cause d’un arrêt maladie.
Quand doit-on parler de report ? Il faut lire ici simplement le texte du nouvel article L. 3141-19-1 du Code du travail : « lorsqu’un salarié est dans l’impossibilité, pour cause de maladie ou d’accident, de prendre au cours de la période de prise de congés tout ou partie des congés qu’il a acquis, il bénéficie d’une période de report de quinze mois afin de pouvoir les utiliser ».
A quel moment doit-on s’interroger sur une possibilité de report ? En fin de période de prise ! Il concerne donc les arrêts maladie ou accident dont le terme ne permet pas de solder les droits à congés avant la fin de la période de prise, que ce terme intervienne avant cette fin ou après.
Le droit à report des droits à congés institué par la loi du 22 avril 2024 couvre les conséquences tant d’un arrêt maladie non professionnelle que des arrêts accident de trajet, accident de travail ou maladie professionnelle. Le principe étant que, faute d’avoir pu solder ses droits avant la fin de la période de prise à cause de l’arrêt, le salarié va les conserver pendant une période de report de 15 mois.
Comment décompter ce délai ? On doit déterminer le point de départ puis vérifier que des évènements n’ont pas eu d’impact sur le terme du délai.
Le point de départ : l’article L. 3141-19-1 du Code du travail le fixe au jour où l’employeur remplit son obligation d’information du salarié telle que prévue désormais par l’article L. 3141-19-3 du Code du travail.
Avis d’expert :
La lecture combinée des deux articles cités ci-dessus crée une situation particulière : le délai de 15 mois de report est susceptible de débuter avant même la fin de la période de prise initiale des droits à congés concernés par ce report. Dans l’exemple présenté dans la première partie de l’article, pour l’arrêt s’achevant le 20 avril, si l’employeur informe le salarié de ses droits dès le 21 avril, alors le point de départ des 15 mois débute dès le 21 avril, soit avant le terme de la période de prise qui est le 1er mai. On aurait pu penser que faire débuter la période de report au terme de la période de prise initiale serait la solution choisie par la loi du 22 avril 2024 dans un souci de simplification et de cohérence !
Attention, une situation particulière entraîne un autre mécanisme de détermination du point de départ du délai de 15 mois. Situation visée par l’article L. 3141-19-2 du Code du travail.
Ne sont ici visés que des droits à congés payés acquis durant un arrêt maladie ou accident et non l’ensemble des droits acquis sur une période.
Et encore plus précis, ceux acquis sur une période d’acquisition donnée lorsque l’arrêt dure au moins un an au dernier jour de cette période d’acquisition. Si on se trouve dans cette situation particulière, un droit à report s’applique avec comme point de départ le terme de la période d’acquisition de ces droits.
Tout est compris ? Félicitations, c’est un exploit. Cependant, il reste encore une règle supplémentaire, toujours sur cette simple question du point de départ du délai des 15 mois. Dans la situation propre aux droits acquis uniquement sur des périodes de maladie ou d’accident, décrite dans le paragraphe précédent, le calcul du délai des 15 mois débute au terme de la période d’acquisition. Il n’est pas pris en compte de la date à laquelle se termine l’arrêt de travail, pouvant donc conduire à un arrêt toujours en cours une fois les 15 mois passés. Dans ce cas, le salarié perd tout droit sur les congés payés concernés par ce report. A l’opposé, lorsque le salarié reprend le travail avant la fin du délai des 15 mois, le décompte du délai doit être interrompu. Il ne reprend pour la fraction restante qu’une fois l’information prévue par l’article L. 3141-19-3 du Code du travail réalisée par l’employeur au profit du salarié.
Une fois le point de départ du délai de report déterminé, ce qui n’est pas une mince affaire, il suffit de décompter de manière calendaire une durée de 15 mois. Toutefois, se pose une question simple : doit-on suspendre le décompte de ce délai, voire le prolonger si le salarié se retrouve à nouveau dans une situation l’empêchant de prendre ses congés avant la fin de la période de report ?
Par exemple, un salarié venant à nouveau à être en arrêt de travail dans les derniers mois précédant la fin du délai de report et disposant encore de jours reportés à solder ?
Perd-il ces jours à la fin du délai ou bien doit-on lui assurer un décalage de la date limite, voire décompter à nouveau un délai de 15 mois ?
Aucune solution n’est donnée à cette question dans le Code du travail à l’heure actuelle. Il conviendra d’attendre de nouveaux textes ou des décisions de justice pour trancher le débat. Difficile juridiquement de se positionner maintenant sur l’une ou l’autre des solutions envisagées.
Le présent article ne liste pas l’ensemble des questions juridiques que pose ce nouveau cadre pour le report des congés : quid des droits ne pouvant en pratique pas être posés entre la reprise du travail et la fin du délai de report ? Perte, paiement ou décalage ?
Comment suivre au sein des services RH, le décompte des droits initiaux, reportés (avec des durées de report pouvant être distinctes), décalés ?
Quels outils utilisés ? Peut-on négocier un accord d’entreprise sur le sujet pour uniformiser et simplifier la gestion du report des congés ? Il conviendra de les aborder dans le futur.
Afin d’informer les salariés sur la prise de leur congés payés à leur retour d’arrêt, les Editions Tissot vous proposent des modèle extraits de la documentation « Tissot social entreprise ACTIV ».
Loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, Jo du 23
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